Le Massif des Vosges : des montagnes douces, des paysages exceptionnels, une nature sauvage et intense, un climat rude, un passé tumultueux … et des hommes.
Un peu de géographie !
- Les crêtes vosgiennes qui suivent un axe général nord-sud, sont une ligne de partage des eaux. Vers l’est, les torrents et ruisseaux s’écoulent vers la plaine d’Alsace pour se jeter dans l’Ill, affluent alsacien du Rhin; vers l’ouest, ils alimentent la Moselle et la Meurthe dont les eaux se retrouveront elles aussi dans le Rhin, à Coblence en Allemagne.
- Cette ligne de crêtes forme donc une « barrière » naturelle qui, au fil des siècles, a servi de frontière politique et linguistique entre la Lorraine à l’ouest et l’Alsace à l’est.
- Le Massif des Vosges est « à cheval » sur trois provinces, devenues aujourd’hui des régions : l’Alsace à l’est, la Lorraine à l’ouest et la Franche-Comté au sud, soit six départements français : les Vosges, le Haut-Rhin, le Bas-Rhin, le Territoire de Belfort, la Haute-saône et la Meurthe et Moselle.
Un peu d’histoire !
- de -5000 à -500 ans avant J.C., des Celtes venus d’Europe vivent dans le massif vosgien.
- Une centaine d’années avant J.C., une tribu Gauloise, les Leuques, y vivent. Ils pratiquent le culte du soleil (Baâl ou Belen), d’où le nom de « Ballons »pour désigner les sommets où étaient allumés chaque année de grands feux pour celebrer le solstice d’été.
- A l’aube du premier millénaire, c’est l’invasion Romaine. Les Gaulois vont devenir des Gallo-romains. Ils appartiennent soit à la province de Gérmanie supérieure (actuelles Aslace et Franche-Comté), soit à la province de Gaule Belgique (actuelle Lorraine).
- A partir du 5ème siècle, des tribus Gérmaniques, les Allamans, puis les Francs, envahissent l’Alsace et la Lorraine. Le chef des Francs, Clovis, soumet les Allamans à son autorité. C’est le règne de la dynastie mérovingienne.
- Puis vient la dynastie Carolingienne avec Charlemagne, fervent chrétien qui est sacré Empereur des Francs en l’an 800. Charlemagne, qui était un grand chasseur, appréciait les forêts primitives et giboyeuses des Vosges, où il poursuivait entre autre l’Auroch.
- En 843, le traité de Verdun repartit l’empire carolingien entre les trois petits fils de Charlemagne : Lothaire reçoit la Lotharingie, les Vosges en font alors partie.
- En 870, Charles le Chauve, celui des trois petits fils qui a hérité de la partie occidentale de l’empire de Charlemagne, cède l’Alsace à son frère Louis le gérmanique : c’est le début de la séparation est / ouest dans le massif vosgien. Elle est confirmée au 10 siècle avec le changement de dynastie en Germanie et, au fil des siècles suivants, va se développer sur le versant est de la ligne de crête la culture alsacienne avec sa propre langue francique , dialecte germanique, prend le pas sur le roman (la langue des Gallo-Romains).
- Du moyen-âge à la guerre de Trente ans, ducs et seigneurs règnent sur le massif selon les règles du système féodal. Les Hautes-Chaumes sont exploitées par les marcaires (de l’alsacien « Melker », celui qui trait) qui amènent pâturer leur bétail en été et y fabriquent leur fromage : le munster.
- En 1648, le traité de Münster (en Westphalie) qui met fin à la guerre de Trente an puis la paix de Nimègues (Pays Bas) en 1678 amènent le rattachement de l’Alsace au royaume de France (sous le règne de Louis XIV).
- Le 18 siècle verra :
- la création en 1701 par le duc de Lorraine Léopold, d’un service des « eaux et forêts » qui rendent les forêts indépendantes des chaumes.
- l’appartenance temporaire (de 1738 à 1766) du duché de Lorraine à l’ex roi de Pologne Stanislas Leszczinski, dont la fille, Marie Leszczinska est l’épouse du roi de France Louis XV. Ce dernier voulait faire plaisir à son beau-père.
- le développement de la contrebande de part et d’autre des crêtes vosgiennes (à cause par exemple de la « gabelle », impôt sur le sel).
- les bouleversements de la Révolution en 1789 avec l’abolition des privilèges seigneuriaux, les terres devant désormais appartenir à ceux qui les exploitent.
- En 1790, la France est administrativement divisée en départements : la ligne de crête sépare désormais le département des Vosges de celui du Haut-Rhin.
- Puis c’est la restauration de la monarchie (1815), la révolution de 1848, le Second Empire (1852) avec Napoléon III et la guerre contre la Prusse qui se termine par la défaite de Sedan, le 02 décembre 1870 : la Lorraine (une partie des départements de Moselle et de Meurthe) et l’Alsace (départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin) se retrouvent de l’autre côté de la frontière franco-prussienne. La ligne de crête redevient une frontière étroitement surveillée entre « le Bezirk Oberelsass » du « Reichland Elsass-Lothringen » (ancien Haut-Rhin) et les départements des Vosges et du Territoire de Belfort (partie du Haut-Rhin annexée par la Prusse.
- La fuite de nombreux entrepreneurs alsaciens vers le versant français des Vosges amplifie l’essor de l’industrie textile dans le département.
- C’est également à partir de 1871 que le tourisme commence à se développer. La « ligne bleue des Vosges », avec ses postes de douane et ses militaires, est devenue un objet de curiosité pour la bourgeoisie aisée qui pouvait se rendre en excursion sur les crêtes grâce au chemin de fer et aux transports automobiles.
- Le Club Vosgien voir le jour en 1870. Il balise alors les premiers sentiers d’excursion pédestre.
- En 1875 est fondé le premier Syndicat d’Initiative à Gérardmer.
- Le Club Alpin Français installe en 1887 une table d’orientation au sommet du Hohneck, et en 1897, est inauguré un service de tramway qui relie la gare de Gérardmer au col de la Schlucht et au sommet du Hohneck.
- Restaurants, hôtels, magasins de souvenirs … sont en plein essor. On commence à pratiquer le ski sur les pentes enneigées de la Schlucht.
- La contrebande aussi est florissante : tabac et allumettes allemands se croisent avec l’alcool des bouilleurs de cru français, jusqu’à ce qu’éclate la première guerre mondiale, le 03 août 1914. La ligne de crête sera du nord au sud le théâtre de combats meurtriers. Elle en garde de cruels souvenirs comme en témoignent les nombreux cimetières militaires. C’est à cette époque qu’à des fins militaires fut aménagée la route des crêtes.
- En 1918, l’Alsace redevient française pour une vingtaine d’années. En 1939, c’est à nouveau la guerre. Les Allemands reprennent possession de l’Alsace-Lorraine. Les « Malgré nous » sont enrôlés de force dans la Wehrmacht, et les Vosges sont à nouveau (en 1944-45) le cadre de violents combats qui opposent les armées alliées et les troupes nazies qui se replient laissant derrière elles de vastes champs de ruines.
Ces cinquantes dernières années, la modernisation et l’évolution des transports ont fait des Vosges actuelles un haut lieu touristique , riche de par son passé, ses sites, son accueil.
Un peu de géologie !
Les sous-bassement des Hautes-Vosges sont constitués :
- de gneiss au nord (roche litée résultant du métamorphisme de grés ou de roches granitiques).
- de granites au centre (roche magmatique bien cristallisée, riche en quartz et en feldspath).
- de roches sédimentaires d’origine volcanique au sud (induration de dépôts meubles constitués par des minéraus ou des fragments de roches).
Dans l’ensemble, ce socle provient des restes de l’ancien massif hercynien, datant de l’ère primaire, soit environ -350 millions d’années.
Il y a environ 300 millions d’années (au carbonifère), une chaîne de montagne comparable aux Alpes se forme. Les cinquante millions d’années suivantes, cette chaîne s’érode jusqu’à son démentellement.
Au Trias (-220 millions d’années), le vieux massif s’enfonce jusqu’à tel point que la mer fini par le recouvrir entierrement. Suite à cette immersion, tout au long du secondaire, la sédimentation constituera les différents grés et calcaires.
Au tertiaire (-65 millions d’années à -1,65 millions d’années), sous l’action du plissement alpin s’élève alors le massif actuel.
A la fin de cette période, il y a environ 23 millions d’années, il s’effondre en son centre pour former le fossé rhénan, laissant à l’est la Forêt Noire et à l’ouest le massif vosgien.
Durant le quaternaire (-1,65 millions d’années à -12000 ans) l’érosion des dernières glaciations donnera aux Vosges son relief actuel.
Les Hautes Vosges cristallines :
Sur une longueur d’environ 100kms, elles s’étendent de la vallée de la Bruche au nord du Territoire de Belfort au sud et constituent la majeur partie du massif appelée « la Grande Crête ». Cette ligne qui a une largeur quasi constante de 100 mètres, culmine en permanence à plus de 1000 mètres. Ses principaux et plus connus sommets sont le Grand Ballond (ou Ballon de Guebwiller – 1424 mètres), le Ballon d’Alsace (1247 mètres) et le Hohneck (1363 mètres).
On peut les diviser en 3 parties :
- les Vosges cristallines au nord constituées de granites et de terrains sédimentaires de l’aire primaire ( -570 millions d’années à -225 millions d’années).
- les Vosges moyennes constituées de roches métamorphiques (gneiss, magmatites) et de granites.
- les Vosges méridionales (région des Ballons) constituées de granites et de terrains carbonifères.
Les dernières glaciations du quaternaire ont sculpté et façonné ce paysage laissant à l’est comme à l’ouest de somptueux cirques glaciaires abritant de nombreux torrents, lacs et tourbières.
Les Hautes-Vosges gréseuses :
Sous un profil moins montagneux que leurs sœurs cristallines, les Hautes-Vosges gréseuses se situent entre la vallée de la Bruche, le Donon et le Pays de Salm. Elles avoisinent 900 mètres d’altitude et peuvent parfois culminer à plus de 1000 mètres (Donon – 1008 mètres). Elles s’étendent sur une trentaine de quilomètres sur un axe principal nord / sud et sont donc exposées de plein fouet aux perturbations atlantiques (vents d’ouest). Le climat qu’elles subissent est comparable à celui des Hautes-osges cristallines. La moyenne annuelle des précipitations y est d’environ 1500 millimètres.
Ces montagnes gréseuses se caractérisent par de fortes pentes et d’importants dénivelés et sont entierrement recouvertes de vastes forêts de conifères sur des sols lessivés, maigres et acides.
Les glaciations du quateranaire n’ont pas épargné ce secteur où l’on peut trouver, à l’image moins prononcée que dans le secteur cristallin, des niches glaciaires abritant aujourd’hui de nombreuses petites tourbières bombées circulaires.
Certaines crêtes des Hautes-Vosges cristallines comme le Hohnack, le Taennchel, le Climont, le Haut-Koenigsbourg, le Rocher du Coucou, le Ungersberg, le Heiderkopf, sont encore couronnées par des buttes témoins de grés, ce qui rappelle l’existence d’une couverture gréseuse continue due aux sédimentations de l’aire secondaire.
Le Fossé Rhénan :
Large de 35 à 45 kilomètres, il s’étend sur environ 300 kilomètres, constituant de Bâle à Mayence l’actuelle plaine d’Alsace. Il sépare quasi symétriquement sur un axe nord / sud le Massif Vosgien et la Forêt Noire.
Il y a environ 300 millions d’années, il n’existait qu’un seul massif : le Massif Hercynien.
Au Jurassique inférieur et moyen (-205 millions d’années à -154 millions d’années), ce vieux massif démantelé par l’érosion était alors immergé.
Au jurassique supérieur, la mer se retire et durant tout le crétacé (-135 millions d’années à -65 millions d’années), l’Alsace émerge.
A la fin du crétacé, des mouvements prémonitoires de l’orogenèse alpine rident la couverture secondaire.
A l’éocène inférieur (-53 millions d’années), une série de petits volcans témoignent de l’instabilité tectonique de l’endroit.
De l’éocène supérieur à l’Oligocène inférieur (-35 millions d’années), l’affaissement du futur Fossé Rhénan s’affirme, un lac salin s’y développe.
Au rupélien (environ -30 millions d’années), le Fossé Rhénan s’ouvre sur la mer du nord. Pendant cette période (de l’éocène supérieur au miocène supérieur), une nouvelle sédimentation intervient.
A partir du miocène supérieur, la mer se retire définitivement du Fossé Rhénan. Au pliocène (apparition des alpes), et durant le quaternaire, les mouvements tectoniques reprennent. Les Vosges et la Forêt Noire amorcent une remontée, le Fossé Rhénan poursuit son affaissement.
Suite à ces deux immersions, les sols du Fossé Rhénan sont principalement d’origine sédimentaire avec en surface et en son centre une succession de dépôts de l’ère quaternaire, puis plus profondément de l’ère tertiaire, puis des marnes et calcaires du jurassique, marnes et sels du keuper, calcaires du muschelkalk, grés roses du buntstandstein … jusqu’au granites.
Un peu de climatologie !
Les conditions climatiques des Hautes-Vosges sont très variées. Les mouvements des masses d’air (en particulier de l’ouest), les différences d’altitudes et l’exposition globale du massif aux vents les déterminent.
Ces différents paramètres se traduisent par un abaissement de la température en fonction de l’augmentation de l’altitude, des précipitations plus importantes sur le versant ouest, des condensations, du givre et de la neige.
Ces variations ont une influence importante sur les végétaux. Elles en déterminent la taille, la forme, la localisation et les associations.
Le climat qui en résulte est relativement rude. Les espèces animales qui y vient sont en conséquence adaptées.
Le printemps au Hohneck:
- Température moyenne : 5,6°.
- Précipitations moyennes mensuelles : 120 mm (1mm = 1 litre par m²).
- Particularité : fonte tardive des névés (parfois jusqu’en août).
L’été au Hohneck :
- Température moyenne : 10,2°.
- Précipitations moyennes mensuelles : 125 mm (1mm = 1 litre par m²).
- Particularité : environ 10 jours de brouillard au mois de juillet qui est le plus ensoleillé de l’année.
L’automne au Hohneck :
- Température moyenne : 1,4°.
- Précipitations moyennes mensuelles : 192 mm (1mm = 1 litre par m²).
- Particularité : premières chutes de neige en octobre.
L’hiver au Hohneck :
- Température moyenne : -2,5°.
- Précipitations moyennes mensuelles : 160 mm (1mm = 1 litre par m²).
- Particularité : environnement rude, enneigement important compte tenu de l’altitude..
Et beaucoup de passion pour cette montagne à vivre sans modération !
Sources et copyright : « Les Hautes-Vosges à pied » – Edition GobeLune – 2000